Vous le connaissez sûrement de nom; le célèbre photographe Pinsonneault. Ses clichés illustrent presqu’à tout coup les chroniques et les expositions temporaires du Musée. Apprenons-en plus sur ce célèbre personnage de l’histoire johannaise et son apport capital pour documenter la ville et ses habitants.

Parcours

Joseph-Laurent Pinsonneault est né le 3 septembre 1862, à Saint-Jacques-le-Mineur. Sa famille déménage à Saint-Jean lorsqu’il a à peine sept ans. Son père tient un étal de boucher au marché public. Le jeune Pinsonneault abandonne l’école à un jeune âge pour travailler et aider son père à subvenir aux besoins de sa famille. C’est ainsi qu’il fréquente peu à peu le studio photo de P.-L. Brault, sur la rue Richelieu. Dès 1876, il y travaille le dimanche. C’est effectivement la journée la plus achalandée car les gens, sur leur 31 pour aller à la messe, profitent de l’occasion pour ensuite aller « se faire tirer le portrait ». Brault initie J.-L. Pinsonneault aux rudiments de la photographie. Pinsonneault perfectionne ses connaissances dans les livres. Il ouvre ensuite son propre studio sur la rue Richelieu en 1884. Il déménage à quelques reprises avant de se porter acquéreur de l’ancien studio de Brault, en 1891, récupérant du même coup la clientèle.

J.-L. Pinsonneault s’implique activement dans la vie citadine. Sa renommée lui permet d’être élu conseiller municipal en 1900. Il occupe ce poste jusqu’en 1903, puis de 1906 à 1915. Pinsonneault sera maire de Saint-Jean, de février 1916 à février 1917. Il a d’ailleurs l’honneur de présider la cérémonie d’inauguration du pont Gouin durant son mandat. Pinsonneault sera aussi commissaire à la commission scolaire de 1917 à 1935, dont quelques mandats à titre de président.

Pinsonneault, en tant que photographe, immortalise de nombreux bâtiments et paysages de Saint-Jean. Il réalise également des milliers de portraits. On estime sa production globale, au cours de sa carrière, à plus de 75 000 clichés.

Il diversifie sa production au tournant du siècle, vers 1903, lorsqu’il se met à produire des cartes postales. Il est un réel précurseur dans ce domaine. Ses cartes sont mêmes envoyés en Allemagne, une fois imprimées, pour être rehaussées de couleur.

En 1906, Pinsonneault déménage une dernière fois son studio au 155, rue Richelieu. Pour ses commandes, il mise sur la confiance avec sa clientèle, si bien qu’il ne demande ni nom ni adresse lorsque les gens se présentent à son studio. Un ancien employé de Pinsonneault raconte qu’il se fiait à la ressemblance pour remettre les photos à qui de droit. Cela explique qu’il soit aujourd’hui bien difficile d’identifier qui se trouve sur les photos qui ont traversé le temps.

Jusqu’à la Première Guerre mondiale, J.-L. Pinsonneault n’a pas d’électricité dans son studio. Les clichés sont pris sous une verrière, à la lumière naturelle. Comme dans la plupart des studios de l’époque, Pinsonneault possède un fond de scène et quelques meubles et accessoires pour définir le décor.

Dès 1916, son fils Aimé Pinsonneault (1900-1977) se joint à lui dans l’entreprise. Il se charge des clichés extérieurs, alors que J.-L. Pinsonneault se concentre sur les portraits en studio et sur les retouches. Deux de ses filles se joignent également à lui à la même époque. Luce (1902-1990) s’occupe de l’impression des clichés, alors que Marthe (1907-1984) s’occupe des retouches et d’ajouter la couleur. Elle a aussi la tâche bien importante de faire rire les enfants durant les séances de photographie.

Pinsonneault développe ses photos dans une teinte sépia, c’est-à-dire cuivré. Il utilise une solution à base de sels d’or. Lorsqu’il en manque, il va chercher un cinq dollars en or à la banque, qu’il fait fondre chez le forgeron et verse directement dans la solution. L’or massif donne une teinte caramel à certains de ses clichés.

Pinsonneault décède le 14 juillet 1956 à 93 ans. Ses enfants continuent d’opérer le studio jusqu’en 1966. Durant sa vie, Pinsonneault a été marié deux fois et a eu douze enfants, dont plusieurs se sont dirigé dans le domaine de la photographie, comme leur père, et quelques-uns de leurs oncles.

Collection du Musée

C’est en 1986 que le Musée du Haut-Richelieu reçoit une importance donation de l’historien de l’art Réjean Lapointe, qui travaillait sur J.-L. Pinsonneault dans le cadre de sa maîtrise. En contact avec Marthe et Luce Pinsonneault, ce dernier a appris que la majorité du matériel et des archives du photographe avait pris le chemin du dépotoir à la fermeture du studio, sauf quelques boîtes. Ces quelques boîtes, ce sont 3200 objets, dont des négatifs, des notes, de la correspondance et du matériel de photo, qui ont intégré la collection du Musée en 1986, sous le nom de fonds Pinsonneault. Ce sont ces images qui documentent notre ville et agrémentent les chroniques.

Le Musée a tenu quelques expositions temporaires sur Pinsonneault au cours des décennies, entre 1993 et 1995, en 1999 puis en 2008. Ce n’est qu’en 2010 que le fonds Pinsonneault a commencé à être numérisé. La documentation du corpus est toujours en cours.

Merci à Joseph-Laurent Pinsonneault qui nous a offert un coup d’œil privilégié dans l’histoire de Saint-Jean.